Flow, vous avez dit flow ? Moi je suis sur un nuage, attention à la chute !

Publié le 3 février 2025 à 14:39

Je parle beaucoup dans mes articles, dans mes discussions avec les personnes, équipes, dirigeants que j'accompagne, mentore ou forme, de la notion de flux.

Beaucoup pensent, au premier abord, que je ne vais leur parler que de flux opérationnel, flux de travail.

Même si effectivement je parle beaucoup de cela, après tout je suis au sein d'une DSI avec de gros enjeux d'efficience de delivery, il faudra aux plus aguerris peu de temps (et un peu plus pour les autres) pour comprendre qu'il n'y a pas que ça en jeu.

Par exemple, dans l'un de mes derniers articles, je parlais d'humanisation du lieu de travail : https://www.linkedin.com/pulse/la-strat%25C3%25A9gie-kanban-une-approche-humaine-de-au-travail-jose-coignard-s3jbe/?trackingId=jCasssvqSrGForl%2FYNtBAg%3D%3D

dans un autre plus récent, je touchais aux sentiments humains d'optimisme et de pessimisme : https://www.linkedin.com/pulse/pourquoi-loptimisme-peut-amener-%25C3%25A0-l%25C3%25A9chec-de-votre-produit-coignard-ooavc/?trackingId=jCasssvqSrGForl%2FYNtBAg%3D%3D

Quand je parle de flux, j'aime finalement plutôt employer le terme anglais flow, car on a cette expression franglaise "Être dans le flow".

Dans le sport que je pratique (le badminton), il arrive que l’on dise qu’un joueur ou joueuse est sur un nuage. Ça m'est arrivé plusieurs fois dans ma carrière d'amateur (niveau national quand même, il y a quelques années). Qu'est-ce qui me mettait dans cet état ? Dans un état où tout semble te réussir, où tu ne crains rien, tu essaies des choses inhabituelles ou très difficiles et ça marche !

Mon analyse de cela avec du recul et plus de connaissances m'amène à ces éléments clés :

- L’entraînement ; Aux alentours de 30 ans, c'était 3 entraînements par semaine, des compétitions presque tous les week-ends. Une 20aine d'heures passées à transpirer sur un terrain par semaine, sans compter les autres heures passées en préparation physique.

- L’enjeu ; Les fois où j'ai atteint ce stade, c'était parce qu'il y avait un enjeu particulier. Une compétition d'équipe pour monter en division supérieure ou se maintenir. Une première finale en mixte avec ma femme à un tournoi national. Un tournoi international où je représentais la France. Un lot pour le gagnant que je ne voulais surtout pas rater.

- La concurrence ; Cet état de flow, je l'ai souvent vécu lorsque mon adversaire était plus fort, qu'il me poussait à aller au-delà de mes limites. Je ne l'ai jamais vécu lorsque ma perception était de jouer contre un adversaire moins fort.

Je connais maintenant les travaux de Mihaly Csikszentmihalyi un psychologue américain et hongrois.

J'aime beaucoup la représentation qui peut en être faite :

Je retrouve mon expérience que j'ai vécue à travers le sport dans ces recherches et cette représentation. Ceci a différent stade de mon évolution dans ce sport, je l'ai vécu au niveau de compétence "départemental", mais aussi "régional" et "national".

Ce que je veux dire par là, c’est que l'axe horizontal est à contextualiser pour soi et son environnement proche. Si je compare mon niveau de compétence à un niveau champion olympique, je serai sur la gauche vers le moins. Si je replace cela dans mon contexte, je peux effectivement avec de l'entraînement aller vers la droite. C'est jouable pour tout le monde !

Maintenant, si je fais le parallèle avec le travail, ce qu'il se passe au sein d'une équipe, d'un département.

L’entrainement

Si les personnes ne s'entraînent pas individuellement ou collectivement, que va-t-il se passer ?

Individuellement, les personnes autour de moi, dans mon contexte, qui s'entraînent, qui développent de nouvelles compétences, vont progresser plus rapidement que moi. Mon contexte de référence va changer, je vais tirer vers la gauche. Je passerai de relaxation à apathie, par exemple, ou de l'excitation à l'anxiété.

Pas positif tout ça !

Le contexte changeant, il est aussi très probable que collectivement il leur soit confié de plus grands défis. On passerait de l'apathie à l'inquiétude, ou de l'inquiétude à l'anxiété, par exemple.

Pas non plus positif !

Prenons un autre exemple, un exemple qui m'a touché plus d'une fois il me semble dans ma carrière. Cette fois c'est moi et une toute petite poignée d'autres qui développons nos compétences plus rapidement que le reste. Le référentiel ne change pas collectivement. On tirera nous vers la droite sur cet axe.

Le référentiel ne changeant pas, moins de chances que les défis confiés soient plus importants. On finit d'ailleurs, pour ceux qui ont beaucoup progressé, par voir ces défis de moins en moins, eh bien... challengeant.

On passe de l'excitation à l'état de FLOW, super ! Mais on tombe assez vite dans l'ennui.

 

L'entraînement, la montée en compétence, le renforcement des expertises est primordial en entreprise, cependant attention à ce que cela soit bien encadré, à ce que les défis proposés mais aussi l'écosystème évoluent à un rythme similaire ou en tout cas ne laissant pas trop de distance... sinon psychologiquement ça sera négatif voire deviendra un véritable calvaire.

 

L’enjeu

Si on s'intéresse à l'enjeu, je perçois (et il me semble qu'il y a des études sérieuses sur le sujet), que les nouvelles générations sont de plus en plus en quête de sens. Il faut que leur travail s'accroche à leurs valeurs, il faut que leur travail serve à quelque chose de grand, tourné vers quelque chose d'utile pour leurs enfants, par exemple vers la transition écologique, ou le développement social, ou encore la souveraineté territoriale (et bien d'autres choses).

Sans un enjeu qui nous porte, moins de chances qu'on se lève pour aller au travail avec la patate !

À la moindre difficulté, de grandes chances de baisser les bras, de remettre à plus tard, d'oublier consciemment ou inconsciemment. Dommage pour l’avancée du sujet ! Et ce sera une bonne perte en efficience car il y aura eu un changement de contexte.

La transmission de cet enjeu est cruciale, c'est le travail des leaders de l'entreprise. Un travail qui dans les grosses entreprises cascadent des échelons hiérarchiques. En cascadant cela risque de se transformer et de décrocher de ce qui était poursuivi au niveau de l'entreprise, du département, etc. Il y a donc une importance majeure à parler souvent de ces enjeux (déclinés en objectif), à en parler avec des éléments factuels de tous les niveaux (marché, politique, opérationnel etc.) et s'assurer de rester aligné.

Dans une approche produit, ce sera le Product Owner qui portera le dernier échelon, qui sera le leader charismatique transmettant le sens, le pourquoi de ce produit, le pour qui et quoi aussi. Ce PO a un rôle pas simple, mais tellement important, afin que l'équipe produit ait la patate, l'envie à 200% de performer sur ce produit. Sans cela, peu de chances qu'ils atteignent l'état de FLOW.

 

La concurrence

Enfin la concurrence, n'est-ce pas ce qui nous pousse vers le haut depuis des siècles, voire des millénaires ?

L'humain est une espèce animale et dans la jungle seuls les plus forts survivent et se développent. Heureusement, nous sommes aussi une espèce intelligente et avons mis un cadre à cette jungle. Cependant, notre monde actuel, à mon sens, est une jungle dangereuse où seules les entreprises, ayant fait leur place dans ce monde ultra concurrentiel et qui ne s'arrêtent pas d'évoluer, d'innover, arriveront à survivre.

Je fais partie de ceux qui pensent que tu n'atteins pas le sommet sans avoir chuté, t'être relevé, redémarré, de nouveau chuté, puis s'être encore relevé, etc. C'est par la concurrence et les échecs que l'on se forge, que l'on devient meilleur. C'est en ayant vécu cela plusieurs fois que l'on peut se forger un état mental permettant d'atteindre l'état de FLOW.

Pour une équipe, j'aime beaucoup le parallèle que fait Steve Tendon dans son livre Standing on bits.

Si la concurrence n'est pas perçue ou percevable par une équipe, alors elle peut s'auto-concurrencer avec ses données de fonctionnement historique. Ceci lui permet d'aller chercher et, si possible, maintenir cet état de FLOW.

Ce parallèle se fait entre la représentation des travaux de Mihaly Csikszentmihalyi présentée plus haut et la représentation des éléments de travail et potentielle valeur que l'équipe a dans son processus dans un graphique d'âge.

J'ai décrit une utilisation de ce graphique par exemple lors d'un daily Scrum dans cet article : https://gratuit-4292598.webador.fr/articles/1596653_la-strategie-kanban-un-veritable-levier-pour-un-bon-daily-scrum

Pour faire court, chaque colonne représente un état du processus de l'équipe, on peut voir les libellés de ces états sur l'axe des abscisses.

L'axe des ordonnées donne l'âge, donc le temps pris depuis le démarrage des travaux (entrée dans l'étape la plus à gauche sur cette représentation) pour chaque élément, représentés par des points bleus.

Les zones de couleurs représentent le vieillissement historique des éléments qui sont déjà terminés, qui ont précédemment traversé le flux :

·       En vert, on trouve 50% des éléments historiques ayant traversé l’étape en moins de temps que le plafond de la zone,

·       En jaune, on trouve 35% des éléments historiques ayant traversé l’étape avec un âge supérieur à 50% des éléments mais inférieur au 15% des éléments ayant le plus vieilli,

·       En rouge les 15% d'éléments historiques qui ont dépassé le vieillissement du seuil de la zone rouge

Ce que met en avant Steve, c'est qu'en superposant ce type de graphique à la représentation des travaux de Mihaly Csikszentmihalyi, on obtient :

J'aime beaucoup, car effectivement si l'équipe a ses sujets qui sont dans le vert alors elle est totalement en contrôle, voire dans une zone de relaxation / ennui. Elle pourrait certainement faire mieux à l'avenir. Ce challenge de faire mieux à l'avenir ferait descendre toutes les zones de couleur, ce qui la rapprocherait de l'état de FLOW.

Si les sujets sont dans la zone rouge, alors l'équipe devrait être anxieuse de cette situation, pourquoi prenons-nous autant de temps ? Nous avons des clients, des parties prenantes qui attendent ces sujets ! Elle devrait tomber dans l'excitation rapidement, une excitation pour résoudre les problèmes et faire de nouveau avancer de façon plus fluide le sujet. Une excitation, un travail de groupe qui pourrait la faire basculer dans l'état de FLOW.

Enfin, lorsque les éléments sont dans la zone jaune, l'équipe est en contrôle, voire en état de FLOW, il n'y a pas à s'inquiéter. Il ne faut pas perturber cet état, il faut dérouler, laisser l'équipe sur son nuage.

Avec le temps, les améliorations du processus de l'équipe, des compétences au sein de l'équipe, toutes ces zones de couleur devraient descendre sur l'échelle de l'âge. Il ne faut cependant du coup pas oublier l'autre axe, l'axe du challenge, ceci afin d'ouvrir les portes de l'innovation à l'équipe. Les portes pour sortir des sentiers battus et développer le produit au-delà de l'espérance, sinon l'équipe encourt le risque de tomber dans les zones d'apathie, de relaxation, d'ennui qui ne seront ni bonnes pour l'équipe, les collaborateurs, mais aussi l'entreprise.

Conclusion

La notion de flux, ou "flow", transcende le simple cadre opérationnel pour englober des dimensions humaines essentielles au sein des équipes et des organisations. À travers mes expériences personnelles et les recherches de Mihaly Csikszentmihalyi, il m’apparaît clairement que l'atteinte de cet état optimal de performance repose sur trois piliers fondamentaux : l'entraînement, l'enjeu et la concurrence.

L'entraînement, tant individuel que collectif, est crucial pour maintenir un niveau de compétence qui permet de relever des défis stimulants. Sans cela, le risque de stagnation et d'ennui guette. L'enjeu, quant à lui, doit résonner avec les valeurs des collaborateurs, leur offrant un sens et une motivation pour s'engager pleinement dans leur travail. Enfin, la concurrence, qu'elle soit interne ou externe, agit comme un moteur d'amélioration continue, incitant chacun à se surpasser.

Il est donc impératif pour les leaders d'entreprise de créer un environnement propice à l'épanouissement de ces éléments. En cultivant une culture d'apprentissage, en communiquant clairement les enjeux et en favorisant une saine concurrence, ils peuvent aider leurs équipes à atteindre cet état de flow tant recherché. Cela ne profitera pas seulement aux individus, mais également à l'ensemble de l'organisation, en favorisant l'innovation et l'efficacité. En somme, pour naviguer avec succès dans le monde complexe et compétitif d'aujourd'hui, il est essentiel de reconnaître et d'encourager ces dynamiques de flux au sein des équipes.

 

Et vous et votre équipe, êtes-vous en état de FLOW ?


Je vous recommande vivement de vous intéresser aux travaux de Steve Tendon.

Pour cela, je vous invite à rejoindre son programme d'apprentissage en ligne Flowbooster : https://tameflow.com/join-flowbooster/

Si vous souhaitez poursuivre la démarche entreprise lors de cet article (ou après le e-learning Flowbooster), je vous invite à me contacter afin que nous puissions déterminer ensemble comment je peux vous servir de guide.

Je vous invite également à me rejoindre dans mes classes certifiantes ProKanban.org. Pour le moment, je n'ai mis en ligne que deux classes publiques, mais contactez-moi si les dates ne vous conviennent pas, si vous souhaitez suivre cette formation en équipe d'entreprise ou si vous voulez suivre une des autres classes de ProKanban qui ne sont pas répertoriées dans ce calendrier : https://www.tickettailor.com/events/theflowmizer/

Enfin, n'hésitez pas à commenter et à ouvrir des discussions, je suis certain que nous pourrons apprendre beaucoup ensemble :-)

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